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Le visage 3.0 de la politique municipale

Le visage 3.0 de la politique municipale

Après plus de 50 jours de campagne, des milliers de portes visitées et des centaines de soupers-spaghetti, les nouveaux élus municipaux auront beaucoup de pain sur la planche pour les quatre prochaines années. Si, dans certaines municipalités le suspense a perduré jusqu’à tard en soirée, d’autres luttes ont été sans équivoque.

Une chose est certaine, les attentes seront très élevées envers cette nouvelle génération d’élus qui souhaite faire les choses autrement. En regardant le nouveau paysage municipal au lendemain de l’élection, le constat est clair : l’ère des tempes grises masculines dans les mairies est révolue.

En effet, plusieurs grandes villes et de plus petites municipalités ont largement voté pour une candidate ou un candidat âgé(e) de moins de 40 ans. Ainsi, les premiers magistrats de Longueuil, Laval, Repentigny, Sherbrooke, Granby, Saint-Bruno-de-Montarville, Saguenay, Terrebonne et Mascouche, pour ne nommer que celles-là, sont âgés de 29 et 40 ans. Même que la municipalité de Chapais a élu la plus jeune mairesse de l’histoire du Québec, en la personne d’Isabelle Lessard, âgée de seulement 21 ans.

Au niveau de la représentation féminine, on remarque également une présence accrue dans les mairies. Uniquement à Montréal, 8 des 19 arrondissements seront gérés par une femme, en plus de la ville-centre. Ailleurs au Québec, plusieurs femmes ont été réélues ou encore ont délogé le maire en place.

Le fait qu’un nombre grandissant de jeunes et de femmes se lancent en politique est assurément lié aux efforts déployés depuis plusieurs années pour intéresser ces strates de la population à s’engager et à s’investir dans la sphère publique. Les projets d’électeurs en herbe dans les écoles primaires, les simulations du parlement étudiant et la création de commissions jeunesse de partis politiques ont sensibilisé les jeunes, très tôt dans leur développement, à l’importance de la politique. Nous récoltons aujourd’hui le fruit de ces efforts.

De l’autre côté, au niveau féminin, plusieurs femmes ont fracassé le plafond de verre dans les dernières années et ont démontré qu’il était possible de faire autrement et d’apporter un peu plus d’humanisme à la politique. On peut donc penser que les Pauline Marois, Dominique Anglade ou Geneviève Guilbault ont pu inspirer les Valérie Plante, Catherine Fournier, France Bélisle, Julie Dufour ou Évelyne Beaudin à vouloir faire une différence localement.

Ce rejet évident de la « vieille politique » doit tout de même être pris avec un grain de sel. Bien que le monde municipal entre présentement dans une ère 3.0 avec une quantité importante de nouveaux visages et de nouveaux élus avec peu d’expérience politique, il est tout de même préoccupant de voir les taux de participation dans les différentes villes.

Après les campagnes publicitaires soutenues, l’ajout de journées de vote par anticipation, les machines électorales bien huilées des candidats et la proposition de plusieurs projets majeurs, à peine plus du tiers des électeurs ont exprimé leur droit de vote. Laval (30%), Saguenay (32%), Longueuil (33%), Lévis (34%), Gatineau (35%), Montréal (37%) et Québec (45%) n’ont pas réussi à mobiliser la population sur des sujets aussi importants et concrets que le transport, l’habitation, l’environnement ou encore les sports et les loisirs.

Et pourtant, la présence de candidatures jeunesse dans plusieurs municipalités a mis des sujets comme le développement durable, la protection de l’environnement et l’accès au logement à l’avant-plan. Comment expliquer que des sujets si importants et si d’actualité n’aient pas réussi à faire sortir les gens vers un bureau de vote à distance de marche de leur domicile?

Est-ce que la prise de contrôle des mairies par les jeunes et les femmes contribueront à changer les façons de faire, à modifier les priorités et à apporter un souffle nouveau à la politique? Est-ce trop en demander à si court terme de changer de paradigme politique qui existe depuis des décennies? Réussiront-ils à convaincre les machines administratives de suivre leur agenda politique? Pourront-ils réaliser leur programme électoral dans un contexte où moins du tiers de la population a voté?

Les défis du municipal 3.0 sont gigantesques et on peut penser que les quatre prochaines années ne seront pas de tout repos.