Le discours du Trône de 2025 : l'ère Carney prend forme

LA PRESSE CANADIENNE/Adrian Wyld
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Un moment chargé d’histoire et de symbolisme, mais aussi une étape politique marquée par la résilience et la renaissance. Lorsque le roi Charles III, assis dans la chambre rouge du Sénat, a prononcé le discours du Trône du Canada en 2025, il a souligné un nouveau jalon dans l’ascension du Parti libéral, tel un phénix renaissant de ses cendres. Du retour électoral inattendu au dévoilement d’un nouveau cabinet guidé par une lettre de mandat unique et ambitieuse, en passant par la présence cérémoniale du roi lui-même, chaque instant a mené à cette nouvelle phase où l’ambition doit maintenant céder la place à l’exécution.
Avec les fastes désormais derrière, le gouvernement Carney doit affronter la tâche plus ardue : transformer les promesses en politiques concrètes et l’ambition en action. Le discours a peut-être planté le décor, mais la véritable épreuve de leadership et d’héritage commence maintenant.
Promesses renouvelées, priorités familières
Pour un gouvernement fraîchement formé, le discours n’a offert que peu de surprises. Pas de coup d’éclat politique, mais plutôt une relance douce des priorités libérales bien connues : baisses d’impôt pour la classe moyenne, accessibilité au logement, services de garde, régime universel d’assurance-médicaments. Ce sentiment de déjà-vu est voulu.
Mais pour l’observateur averti, la répétition recèle des nuances. La promesse de simplifier les approbations de projets « tout en respectant les droits autochtones et les normes environnementales élevées » peut paraître anodine, mais elle révèle l’intention du gouvernement de concilier ambition économique et responsabilité sociale. Cet équilibre caractérise le moment politique actuel.
Autrefois considérée comme un sujet tabou dans le fédéralisme canadien, la réforme du commerce intérieur est maintenant au cœur de l’agenda économique de Carney. Le discours du Trône a réitéré l’engagement de son gouvernement à éliminer les obstacles commerciaux grâce à l’initiative « Une économie canadienne », visant à renforcer la résilience économique face aux pressions exercées par les États-Unis.
Le discours a également exprimé clairement l’intention de renforcer la position du Canada dans un ordre géopolitique en mutation. Avec des engagements pour moderniser les infrastructures de défense dans le Nord et joindre l’initiative ReArm Europe, le gouvernement Carney effectue une entrée affirmée sur la scène internationale, tout en prenant subtilement ses distances avec une vision traditionnellement centrée sur les États-Unis.
Ce clin d’œil au multilatéralisme est autant un signal diplomatique qu’un calcul politique. Sur le plan national, les électeurs fatigués par les turbulences économiques et l’instabilité internationale pourraient trouver un certain réconfort dans un gouvernement qui parle de souveraineté, de sécurité et d’autonomie.
Les critiques se font discrètes
Malgré la solennité du moment, les chefs de l’opposition sont restés mesurés. Les critiques du Bloc Québécois à l’égard d’un « monarque étranger » relevaient davantage du théâtre que de la menace, tandis que les conservateurs ont déploré le manque de détails quant à la mise en œuvre. Peut-être à juste titre. Par contre, en contexte de gouvernement minoritaire, ce sont les votes qui comptent plus que les applaudissements.
Le NPD, sous la direction intérimaire de Don Davies, a offert un soutien prudent. Le parti a salué les engagements sur le commerce et l’abordabilité, tout en notant l’absence de langage axé sur les travailleurs, de mesures spécifiques pour le logement autochtone et de promesses concrètes en matière de soins de santé. Leur appui demeure probable, sans être assuré.
Et après : l’équilibre délicat d’un gouvernement minoritaire
Ce qui ressort de ce discours du Trône n’est pas une révolution, mais un ajustement. Les libéraux de Mark Carney manœuvrent prudemment, affirmant leur leadership à l’international tout en annonçant une modération budgétaire et un renouvellement national. Le discours passera sans doute le vote de confiance à venir, mais l’épreuve de la gouvernance ne fait que commencer pour le nouveau premier ministre.
Avec une réduction d’impôt pour la classe moyenne en vue, des nominations clés encore en cours et un sommet du G7 à l’horizon, l’été à venir sera tout sauf tranquille pour ce nouveau gouvernement. Pour les parties prenantes, les groupes de pression et les entreprises à l’écoute, le message est clair : soyez prêts, restez vigilants et préparez-vous à intervenir.
Le discours a peut-être donné le ton. Il est maintenant temps de livrer.