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François le tout-puissant

François le tout-puissant

LA PRESSE CANADIENNE/Paul Chiasson

LA PRESSE CANADIENNE/Paul Chiasson

Le résultat est tombé sans grand suspense. Huit petites minutes après l’ouverture des premières boîtes de scrutin, le sort de cette élection était scellé. Aussi prévisible qu’impressionnant, un véritable raz-de-marée caquiste a déferlé d’un bout à l’autre du Québec. La Coalition avenir Québec (CAQ) obtient un deuxième mandat majoritaire consécutif, un exploit qu’aucun autre parti n’avait réussi depuis 1998 et qu’aucun autre chef n’avait réalisé depuis Robert Bourassa en 1989.

L’éclatante victoire de François Legault, avec ses 90 circonscriptions, cache néanmoins un déficit démocratique. Avec 40,97 % des voix, la CAQ fait mieux qu’en 2018 (37,42 %), mais moins bien que Philippe Couillard en 2014 (41,5 %) ou encore que Jean Charest en 2008 (42 %) et en 2003 (46 %). En revanche, il met la main sur 72 % des circonscriptions en raison d’une opposition fragmentée en quatre. Contrairement à ce qu’on aurait pu appréhender en raison de l’issue prévisible du scrutin et de la faible volonté de changement, le taux de participation s’est établi à 66,05 %, dans les mêmes eaux que 2018 (66,45 %).

En dépit d’une campagne électorale difficile, le momentum et l’avance considérable dont bénéficiait François Legault lui ont permis de s’en sortir sans égratignures. N’empêche, le dépouillement du vote a démontré que la CAQ a davantage performé lors du vote par anticipation et que la controverse impliquant le ministre Jean Boulet a eu un effet certain sur le vote libéral, qui s’est moins effondré que prévu dans le grand Montréal. Il a remporté son pari, soit d’avoir fait élire des députés représentant chacune des 17 régions du Québec et le plus grand nombre de femmes.

Dans son discours de victoire, le premier ministre réélu a voulu se montrer rassembleur, lui dont la campagne avait donné l’impression de diviser.

Malgré cette euphorie de la victoire qui a marqué la soirée de François Legault, le premier ministre réélu se réveille devant un véritable casse-tête. Avec une aussi imposante députation composée de gens talentueux et provenant de toutes les régions, la formation du prochain conseil des ministres s’annonce complexe. Attendez-vous à un conseil des ministres élargi, plus important que les 26 qu’il comportait avant le déclenchement des élections, quoique le premier ministre ne voudra certainement pas imiter Bernard Landry, qui en avait choisi 36 en 2002. Par ailleurs, trois candidats ministrables (Caroline St-Hilaire, Jonathan Lapierre et Audrey Murray) ont mordu la poussière.

Quel sort pour les oppositions?

Aucun des partis d’opposition n’a émergé durant la campagne électorale. Certes, le Parti québécois (PQ) a connu une intéressante progression de 6 % dans les intentions de vote, mais son résultat demeure marginal, loin de cette zone payante qui aurait permis au PQ de remporter des circonscriptions. Malgré une bonne campagne, Paul St-Pierre Plamondon aura surtout connu un succès d’estime. Le fait d’avoir remporté son siège dans Camille-Laurin, gracieuseté du désistement de la candidate de Québec solidaire (QS), lui permet de demeurer à la tête de son parti malgré une défaite historique.

La forte dégringolade annoncée des libéraux ne s’est pas avérée. En remportant 21 sièges, en conservant son statut d’opposition officielle et en se faisant élire dans son comté de Saint-Henri –Sainte-Anne, Dominique Anglade a littéralement sauvé les meubles. Malgré tout, le Parti libéral du Québec (PLQ) s’est effondré dans le vote francophone, ce qui laisse présager une longue et difficile reconstruction. Aussi énergique et combative que fût Dominique Anglade, il n’en demeure pas moins que sa campagne a été minée par des problèmes organisationnels, comme si elle était à la tête d’un parti à l’abandon, avec une marque libérale abîmée.

Québec solidaire, qui avait toujours connu une progression depuis l’élection de son premier député, en 2008, a maintenu ses acquis. La défaite dans Rouyn-Noranda–Témiscamingue a été compensée par les gains dans Maurice-Richard et Verdun.

Quant à Éric Duhaime, il échoue dans sa tentative de faire son entrée à l’Assemblée nationale du Québec, mais il a l’intention de briguer à nouveau les suffrages en 2026. Le Parti conservateur du Québec (PCQ) a récolté dix fois plus de voix qu’en 2018, et ses deux candidats dans Beauce-Nord et Beauce-Sud sont passés tout près de se faire élire.

Il est certain que plusieurs observateurs souhaiteront une révision du mode de scrutin. François Legault, qui en avait fait une promesse en 2018, a fermé la porte à double tour pendant la campagne. Il faut parier que les libéraux seront du même avis que lui, ayant été eux-mêmes favorisés par le mode actuel.

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Rédigé par Elizabeth Lemay | Simon Leblanc

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