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Impacts socioéconomiques : la face cachée des chantiers routiers

Échangeur d'autoroutes

Que celui ou celle qui ne s’est jamais plaint d’un chantier routier lève la main! Près de 5 milliards de dollars pour plus de 2 000 chantiers routiers à l’échelle de la province : telle est la programmation 2018-2020 du gouvernement du Québec. À cela s’ajoutent, uniquement pour 2018, les 500 chantiers de la Ville de Montréal, les 850 chantiers de la Ville de Québec, et j’en passe.

Au-delà de la caricature liée aux cônes orange, aux nids de poule et aux longues files de congestion, les chantiers routiers ont des impacts directs et omniprésents sur le quotidien. Nous avons tendance à l’oublier, les impacts sont certes économiques mais également sociaux.

Jetons un œil sur les principales « victimes collatérales » des chantiers routiers.

Le commerce

La fermeture de rues, de tronçons ou de quartiers mine considérablement le commerce dans plusieurs villes. Les regroupements de commerçants ont alerté les gouvernements de la recrudescence de faillites et de gens d’affaires éprouvant des difficultés financières. Souvent laissés à eux-mêmes, ils doivent éponger les pertes durant le chantier pour ensuite bénéficier des nouvelles infrastructures. Mais ce ne sont pas tous les commerçants qui ont les finances assez solides pour passer au travers de ces périodes moins achalandées. Chantier routier peut parfois rimer avec mises à pied. Des plans marketing mis en place afin d’aider les commerçants peuvent amoindrir les effets des chantiers. Pensons aux terrasses rouges sur Saint-Denis ou à la structure gonflable prévue sur Sainte-Catherine.

L’industrie du transport et du camionnage

Les chantiers routiers causent de bien grands maux de tête à l’industrie du transport et du camionnage. Si le transport collectif n’arrive pas à obtenir suffisamment de financement pour répondre à la demande des usagers, malgré les efforts des gouvernements, l’industrie du camionnage perd des centaines de milliers de dollars en raison des retards occasionnés par les détours. Un membre de l’industrie a même quantifié ses pertes à plus de 75 $ par heure de retard. Plusieurs entreprises ont déjà fait appel à des firmes spécialisées afin de produire un plan de relations publiques, voire un plan de gestion de crise, en cas de congestion majeure. Prévoir les impacts des chantiers en dressant la liste des mesures d’atténuation et en les communiquant de la bonne façon au bon public constitue la clé du succès.

Le tourisme

La Chaire de tourisme Transat de l’ESG-UQAM s’est prononcée sur l’impact touristique des chantiers routiers. Bien que la congestion aux heures de pointe à Montréal ne se compare pas à celle de grandes villes comme Los Angeles, New York ou San Francisco, il reste qu’on note à Montréal une congestion presque permanente et de nombreux détours plus ou moins bien signalés, détours que le meilleur GPS ne peut comprendre. Les touristes sont déconcertés et peuvent subir des retards importants à une conférence, à une rencontre, voire à un vol de retour. En raison des alternatives de transport moins développées en dehors des périodes de pointe, le touriste vit une expérience fâcheuse qui ternit la réputation de notre métropole. Une bonne communication sur les entraves et les alternatives permettrait très souvent d’éviter des malentendus et des situations qui ont des répercussions majeures dans les médias.

La santé physique et mentale

Depuis l’ouverture de certains chantiers majeurs comme l’échangeur Turcot, le pont Champlain ou encore sur les autoroutes 15 ou 20, on note certaines plaintes ou réclamations relatives à l’état de santé des riverains. En effet, le nombre de plaintes reliées aux problèmes pulmonaires, aux quintes de toux ou aux éruptions cutanées, tant chez les humains que chez les animaux de compagnie, a augmenté. Certains blâment la poussière pour certaines problématiques physiques alors que d’autres allèguent que le rythme soutenu des travaux les empêche de dormir et leur cause de l’anxiété, voire une baisse de productivité au travail.

En septembre 2016, l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés a réalisé une étude qui avance que 47 % des travailleurs ressentent plus de stress depuis l’ouverture des chantiers routiers. Cette proportion passe à 57 % dans la tranche d’âge des 18-34 ans. Lorsque l’information est diffusée, les détours bien expliqués et que les usagers de la route connaissent les alternatives, il va de soi que les impacts sont beaucoup moins importants. Un plan de consultation qui intègre toutes les parties prenantes et qui tente d’agir le plus possible sur leurs préoccupations rassurera certainement la population sur les principaux enjeux. De plus, présenter en amont les détails et le calendrier des chantiers permettra aux gens de s’y préparer.

Comment minimiser ces impacts ?

Il est évident que les chantiers entraînent des impacts économiques, politiques, culturels et sociaux mais, comme dans toute bonne recette, il faut avoir les bons ingrédients, il faut bien les utiliser et respecter toutes les étapes. L’acceptabilité sociale est l’un de ces ingrédients qui font lever les projets.

L’intégration du concept d’acceptabilité sociale doit faire partie du travail de planification des chantiers. La mise sur pied de comités de bon voisinage ou de comités citoyens en amont du chantier routier tend à résoudre certaines de ces problématiques si le comité est efficace et représentatif. C’est pourquoi il peut être judicieux de faire appel à une firme de communication pour expliquer les projets à la population en leur présentant les plans de déploiement et les mesures d’atténuation associées au chantier.

Il ne faut jamais oublier que la réussite d’un chantier passe très souvent par la qualité de sa préparation tant dans le domaine de l’ingénierie (béton) que dans celui des communications (émotions).